mercredi 31 octobre 2012

Les patrons de presse sont les nouveaux fabricants de lampes à pétrole

Autant vous le dire de but en blanc, ami lecteur vous devriez avoir honte !
Rassurez-vous, il ne s'agit pas de mon opinion personnelle plutôt réjouie voire flattée que vous accordiez quelques instants à mes élucubrations.
Par contre, les dirigeants de la presse écrite payante française, défenseurs autoproclamés de la démocratie, s'autorisent à penser que vous n'avez rien à faire sur ce blog, qui plus est hébergé gratuitement sur une plateforme américaine.
Si, au lieu d'être un complice objectif de l'hydre malfaisant Google, vous étiez un bon français, ou même un bon étranger, vous furèteriez sur ces garants du pluralisme que sont les sites du Monde, du Figaro ou de Libération ou, encore mieux, vous achèteriez un exemplaire papier de ces canards.

La presse française, y compris celle défendant des idées libérales, a vécu après la seconde guerre mondiale dans un modèle économique soviétique, peu propice à la lutte concurrentielle et aux innovations.
Ce système, très confortable durant un demi-siècle, explose sous nos yeux. Audiovisuel, internet et surtout conformisme des dirigeants se liguent pour que, probablement, aucun titre actuel ne voie la prochaine décennie.
Examinons cela en détail.

Quasi-monopoles d'embauche des imprimeurs et des journalistes par le biais de syndicats surpuissants et exclusivité de distribution via une coopérative ont assuré des salaires respectables au personnel mais aussi des coûts élevés et identiques pour tous les journaux.

Le lectorat a longtemps été stable. Publicité et petites annonces garantissaient des compléments de chiffre d'affaire fort appréciables et réguliers. Quand le business vient tout seul, inutile de se battre.
Aujourd'hui encore, un directeur de journal, à l'instar d'un agent de la SNCF évoquant les usagers, parle de lecteurs ou d'annonceurs, jamais de clients.

L'équation économique pour l'utilisateur des nouveaux médias est à l'inverse de celles des journaux.
Pour lire un quotidien, nul besoin d'une mise initiale mais chaque exemplaire nécessite un débours.
Par contre, surfer sur le web, nécessite un investissement, ordinateur ou smartphone ainsi que l'abonnement à un opérateur, mais l'usage est gratuit.
Ici, comme ailleurs, la loi d'airain du marketing s'applique : sans changement profond dans l'offre, le prix d'un produit concurrentiel ne remonte jamais.

Internet a aussi accru fortement l'offre d'informations.
Il y a peu, seule une petite centaine de personnes pouvaient commenter publiquement l'actualité politique, économique ou culturelle. Désormais, nous sommes des dizaines de milliers à le faire, sous des formats très différents. Difficile, dans ces conditions, d'expliquer que le pluralisme est menacé.
L'argument de qualité ne tient guère non plus. Comme disait le regretté Aristote, lors d'un repas, le convive est meilleur juge que le cuisinier. Si vous lisez ces lignes c'est que, je l'espère, vous y trouvez un peu d'intérêt ou de plaisir. Malheureusement pour la presse, pendant que vous parcourez mes humeurs mondialisées, vous ne lisez pas le Monde, le Figaro ou Libération. Honte à vous, fossoyeurs de la diversité d'opinion !

Internet favorise le zapping.
Autrefois, chacun choisissait le journal qu'il estimait proche de ses positions personnelles et le parcourait du début à la fin.
Désormais, nous picorons et de nombreux prescripteurs guident nos choix : des machines comme celles de Google ou des "amis" avec leurs recommandations par mail ou réseaux sociaux.
Sur le web, la concurrence est permanente et à seulement un clic de distance.

Enfin, point très structurant pour l'avenir, internet a révolutionné la publicité.
Jusqu'alors, les médias traditionnels vendaient de l'espace : affiches sur les murs, placards dans les journaux, spots audiovisuels. L'audience de ces supports était assez aisée à évaluer mais l'impact véritable des publicités n'était pas mesurable. Faute d'alternative, les annonceurs s'en contentaient.
Internet a changé la donne en vendant de l'attention, de l'intérêt. Afficher une publicité sur le web est modique voire gratuit, seul le clic est rémunéré correctement.
Pour tirer profit du marché énorme et croissant de la publicité sur internet, les contenus doivent être repensés en fonction de cette vente d'attention et non plus d'espace. Il faut réussir le tour de force de mêler plus intimement information et publicité sans pour autant gruger le lecteur qui est toujours à un clic de la sortie. C'est ce que fait très bien Google sur son moteur de recherche et que ratent complètement les grands médias français.
Un seul exemple de la pensée étroite de la presse française, digne de celle d'un fabricant de lampes à pétrole face à Edison, sur les sites du Monde et de Libération, il est impossible d'acheter sur le champ un livre ou un film dont on vient de lire la critique.

N'ayant pas les mêmes tabous, je conclurais donc cette chronique en vous encourageant à aider la Croix Rouge, à aller vous reposer en Bourgogne à la Ferme de Lili ou encore à déguster avec modération et délectation les vins de Bordeaux de Régis Chaigne !

Googliquement votre

Références et compléments
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- Peu soucieux de prolonger inutilement l'agonie des grands journaux français en m'acquittant d'un éventuel droit d'auteur "voisin", il n'y aura plus sur ce blog de liens vers le Monde, Libération et le Figaro. Une simple mention fera désormais l'affaire.