samedi 4 avril 2015

L'utopie marxiste enfin à portée de main

Au lieu du mot d'ordre conservateur “un salaire équitable pour une journée de travail équitable”, les ouvriers doivent inscrire sur leur drapeau le mot d'ordre révolutionnaire “abolition du salariat”.
Karl Marx - 1847
Le capitalisme libéral est étrangement ironique.
Non content d'être devenu le système économique et social planétaire, il est en passe de réaliser les utopies des marxistes, ses plus grands pourfendeurs.

Les fonds dits de pension - pension funds, initialement anglo-saxons, désormais largement mondiaux - sont aujourd'hui les plus importants propriétaires d'entreprises.
Ces structures financières sont alimentées par les cotisations de leurs adhérents titulaires d'un emploi.
Avec cet apport d'argent, elles acquièrent des actions et autres actifs qu'elles cherchent à faire prospérer.
Les plus-values, intérêts et dividendes sont employés pour payer la retraite des membres ayant cessé leur activité professionnelle.
Beaucoup de ces fonds sont dirigés par des représentants, souvent syndicalistes, des salariés dont ils préparent la retraite.
Ainsi, par exemple, CalSTRS, le fond des fonctionnaires de l'enseignement de l'état de Californie - sorte de MGEN américaine - gère, pour le compte de ses 800 000 adhérents, 200 milliards de dollars d'investissements répartis dans le monde entier. L'équivalent d'un petit mois d'activité économique de toute la France.
Ainsi, ces sympathiques instituteurs et institutrices, bronzés et syndiqués, possèdent, au sens strict, des parts non négligeables d'Apple, Google, BMW et Samsung mais aussi d'Alstom, l'Air Liquide, BNP, Carrefour, Dasssault, Orange, Schneider Electric, TF1, Vivendi, j'en passe et des meilleures.
Grâce aux fonds de pension, "l'appropriation collective des moyens de production", chère aux regrettés Karl Marx et Vladimir Illitch Oulianov alias Lénine, est en marche !

L'autre grand rêve marxiste était l'abolition du salariat.
Là encore, les deux plus grandes aventures capitalistes de l'histoire, les industrie des semi-conducteurs et du logiciel s'emploient à envoyer au tapis “l'asservissement général qu'implique le régime du salariat” que Tonton Karl fustigeait.
L'ubérisation - néologisme dérivé de la marque Uber, célèbre pour ses taxis qui n'en sont pas - remplace les employés d'entreprises aisément identifiables par un tissus d'auto-entrepeneurs branchés sur des réseaux.

Prolétaires de tous les pays, connectez-vous !

[Groucho] marxistement 2.0 votre

Références et compléments
- Au sujet de la fin du salariat, je recommande la lecture de l'article de Jean-Marc Vittori dans les Échos.
- Les différents actifs de CalSTRS peuvent être consultés ici.
- Cette chronique est due aux suggestions insistantes de Jean pour j'écrive un billet sur un sujet totalement différent.