samedi 20 février 2016

Les Trains Express Régionaux étaient bien pires sous Napoléon III

Aux dires de beaucoup de leurs passagers, les Trains Express Régionaux de Rhône-Alpes - plaisamment acronymisés TER - sont un modèle de service déplorable et d'irrégularité.

Toutefois un coup d'œil vers le passé permet de relativiser quelque peu ...


Le numéro du dimanche 12 mai 1867 du journal "Le Dauphiné - revue littéraire et artistique - courrier des eaux thermales de la région" nous informe en dernière page des horaires et tarifs de train entre Grenoble et Lyon.

Un train de sénateur

Relier par le rail la capitale des Alpes à celle des Gaules grâce à une locomotive à vapeur émettant des doses conséquentes de CO2 et de particules demandait alors près de 4.5 heures.

Aujourd'hui, lorsque la voie est libre de conflits sociaux et d'incidents, 80 minutes suffisent à des trains électriques décarbonés, presque exclusivement nucléaires et hydrauliques.

Sous le second empire, il n'y avait que 4 départs depuis la gare de Grenoble : 6H00, 10H05, 15H42 et 17H45.
Désormais, pas moins de 30 circulations ferroviaires quotidiennes sont assurées.



Des tarifs prohibitifs

Vers 1867, un ouvrier était rémunéré 2 francs pour une journée de travail de 10 heures qui se répétait 6 fois par semaine.
Il va sans dire que les charges sociales et l'impôt sur le revenu étaient inexistants et qu'ainsi ce salaire était vraiment "net net".

Le ticket de troisième classe coûtait 7.45 francs, c'est à dire 37 heures de labeur, presque 4 jours !
Pas étonnant qu'avec de tels prix, le départ des habitants des Alpes vers Paris - comme le fit mon arrière-arrière-grand-mère - prenaient des allures d'émigration définitive.

La première classe était le refuge des riches. Les tarifs doublés éloignaient efficacement les prolétaires des banquettes en velours.

En 2016, le billet de seconde classe de TER sans aucune réduction ou abonnement vaut 22.5 €, c'est à dire 2.3 heures de SMIC, 16 fois moins que sous Napoléon III.

Les nouveaux bus impulsés par Emmanuel Macron, le sémillant ministre français de l'économie, font encore mieux. La plupart de leurs billets sont à 9 €, juste en dessous de l'heure de travail ouvrier.
Une économie d'un facteur 40 par rapport aux débuts du chemin de fer.

Empiriquement votre

Références et compléments
Voir aussi la chronique "un destin français : Françoise Arbenne-Reinier migrante" ainsi que d'autres billets sur l'évolution des prix au fil du temps :

Merci à Roland qui a dégotté la collection complète du journal Le Dauphiné de 1867.

L'idée d'étalonner les prix dans la longue durée avec les temps salariaux provient du livre de Jean Fourastié et Béatrice Bazil "Pourquoi les prix baissent ?" (Editions Hachette 1984).