vendredi 16 novembre 2012

Lettre ouverte à Olivier Véran, député de Grenoble

Avertissement aux lecteurs
La chronique ci-dessous est très inhabituelle puisqu'elle dit plutôt du bien d'un homme politique. Elle risque donc de heurter les personnes sensibles ou fragiles.
Âmes délicates, passez votre chemin !


J'ai découvert sur internet, un peu par hasard, une émission de télévision où Olivier Véran, le député de ma circonscription, visite et, surtout, travaille toute une journée devant les caméras chez Clappaz et Locker, petite entreprise d'usinage de Meylan dans la banlieue de Grenoble.
Ce reportage est original et intéressant à plusieurs titres.

J'ai apprécié le courage d'Olivier Véran de se confronter publiquement et physiquement aux réalités de l'industrie et de l'entreprise. Ce médecin et député s'est littéralement sali les mains plusieurs heures d'affilée. Ce type d'attitude est suffisamment rare pour être soulignée.
La capacité d'écoute et de dialogue du parlementaire m'a agréablement surpris. Au fil de la journée, l'élu échange avec de nombreuses personnes : ouvriers usineurs, chef d'atelier, secrétaire, projeteurs du bureau d'études, dirigeant de l'entreprise. Les paroles qui lui sont adressées diffèrent sensiblement des discours convenus des appareils politiques et des syndicats de tout poil.

L'émission a surtout le mérite rarissime de montrer de manière longue et non caricaturale l'industrie. Ce coeur de l'économie dont la productivité assure le fonctionnement du reste de la société, y compris la santé et les services publics, est tragiquement absent des médias et même, désormais, des représentations collectives.
Les caméras qui suivent Olivier Véran dans l'atelier et au bureau d'études dévoilent la réalité complexe et contradictoire des entreprises industrielles.
On y voit tour à tour :

- La grande interdépendance des entreprises qui forment le tissus industriel, ainsi Clappaz et Locker a vu son chiffre d'affaire baisser de 40% lors de la crise de 2008.

- La très forte concurrence et, par voie de conséquence, la compétition permanente pour la qualité, les délais courts et les baisses de coût.

- La combinaison indispensable de travail manuel et de technologies.

- Le professionnalisme et la passion du travail bien fait qui sont le point commun entre les ouvriers, le bureau d'études, l'encadrement et la direction.

- L'écart important et ancestral, y compris dans une petite structure familiale, entre les points de vue des dirigeants, de l'encadrement et des ouvriers.
La lutte des classes n'est pas qu'un concept marxiste mais une réalité ancrée dans le quotidien des personnes travaillant dans l'industrie. Plusieurs fois dans le reportage, les paroles contraires des uns et des autres surprennent le député.

Sur ce dernier point, la position d'Olivier Véran relève, de mon point de vue, du vœu pieu puisqu'il en appelle au dialogue et au consensus entre partenaires dits sociaux, c'est à dire entre syndicats de salariés et d'employeurs.
Malheureusement, ces derniers - et c'est un sujet que je connais de l'intérieur - sont des appareils bureaucratiques sans réelle représentativité, particulièrement dans l'industrie compétitive et les petites entreprises. Messieurs Thibaut et Chérèque ainsi que Madame Parisot ne sont pas les porte-paroles des salariés et des entreprises, mais des permanents syndicaux qui les élisent.
Pour que cette situation évolue, trois conditions sont nécessaires à défaut d'être suffisantes :
- Les élections professionnelles doivent devenir véritablement démocratiques, c'est à dire ouvertes à toutes les candidatures, y compris en dehors des syndicats patentés.
- La législation sociale doit donner sur certains sujets clefs un pouvoir décisionnel, et non consultatif, aux représentants élus du personnel. Comme contrepartie, beaucoup de procédures très lourdes où seul un avis est requis pourraient être allégées voire supprimées.
- Les accords d'entreprise, pour être applicables, devraient être réellement majoritaires et non minoritaires comme aujourd'hui.

Industriellement votre

Références et compléments
- Emission de LCP "J'aimerais vous y voir" - Episode "Olivier Véran dans une PME"
- Olivier Véran est député socialiste de la première circonscription de l'Isère (une partie de Grenoble ainsi que banlieue nord-est). Il est le suppléant de Geneviève Fioraso devenue ministre dans le gouvernement de Jean-Marc Ayrault.
Je précise que je ne le connais pas personnellement et que je ne fais pas (encore ???) partie de ses électeurs. Si Olivier Véran souhaite apporter un commentaire ou une réponse à cette chronique, les colonnes de ce blog lui sont naturellement ouvertes.
- Site web d'Olivier Véran