lundi 28 octobre 2013

La France de 1945 ressemblait plus à celle de Louis-Philippe qu'à celle de François Hollande

C'est un euphémisme de dire que, sous les coups de boutoir de la "crise d'une ampleur inégalée", les français sont pour le moins déboussolés.
Afin de tenter de nous redonner sens et espérance, de nombreuses voix nous proposent de revenir aux méthodes ayant réussi dans les années 1930 et 1940.
Certains veulent ressusciter Franklin Delano Roosevelt ou Léon Blum. D'autres encore, à l'instar de l'indigné et regretté Stéphane Hessel, proposent de revivifier les riches heures de la Résistance et de la Libération.
Pourtant la société de 2013 n'a plus rien de commun avec celle de 1945. Au sortir de la seconde guerre mondiale, les façons de vivre des français se rapprochaient plus de celles du règne de Louis-Philippe que des nôtres.
Jugez sur pièces.

Le niveau de vie à fin des années 1940 était 5 fois plus bas qu'aujourd'hui, à mi-chemin entre l'Algérie du sub-claquant Bouteflika et la Tunisie post-révolutionnaire. Il atteignait un peu moins de 5 000 € actuels par an et par français contre 22 500 € désormais.

Par contre, peu de temps après la Libération, le chômage ne touchait qu'un actif sur 50 alors qu'aujourd'hui il culmine à presque 1 français sur 9.
A cette époque, agriculture, industrie et tertiaire assuraient chacun un tiers des emplois. Dorénavant, 3 français sur 4 opèrent dans les services et à peine 1 sur 25 travaille encore la terre.

La population française était en 1945 de 40 millions d'habitants, sensiblement la même valeur qu'en 1900.
Depuis, elle a augmenté régulièrement de 350 000 personnes chaque année, pour atteindre 65 millions. La croissance démographique a été plus forte de la seconde guerre mondiale à aujourd'hui que de 1700 à 1950.
Une des raisons de cette envolée est que la France actuelle est nettement moins pressée de rejoindre le cimetière que celle de la IVème république.
Malgré la fin des hostilités, entre 1945 et 1950, une personne sur 50 passait l'arme à gauche tous les ans contre une sur 115 dorénavant.
Pire, un enfant sur 15 mourrait en bas age. En 2012, ce taux est passé  à moins de 1 nourrisson sur 300.
Notons, toutefois, que la natalité n'a guère changé avec, grosso modo, une moyenne de 2 enfants par femme et une naissance annuelle pour 75 habitants.
Par voie de conséquence, la France des années 1940 était beaucoup plus jeune qu'aujourd'hui. Une personne sur 3 avait moins de 20 printemps et seulement 1 sur 5 plus de 60 balais. Désormais, moins d'un français sur 4 est jeune alors que les tempes d'un tiers de la population sont argentées.

Après le second conflit mondial, le couple marié ad vitam eternam pour le meilleur et pour le pire restait la norme.
Annuellement, 1 français sur 50 se mariait, à peine 1 sur 450 divorçait et seulement 1 enfant sur 20 naissait en dehors des liens sacrés reconnus par monsieur le maire et monsieur le curé. Moins d'un couple sur 60 vivait dans le pêché.
Les mariages ne concernent plus en 2013 qu'une personne sur 250 alors que les divorces touchent un français sur 130. Un ménage sur 5, dans lesquels naissent près de 6 bébés sur 10, n'éprouve plus le besoin de légaliser son union.

Le patriarcat et les respect des soi-disant bonnes mœurs étaient la règle séculaire.
Même si la Résistance s'empressa de donner le droit de vote aux femmes aussitôt le territoire national débarrassé des nazis, de nombreuses évolutions législatives se firent attendre :
- 1965 pour qu'une femme puisse travailler sans l'autorisation de son mari,
- 1967 pour la pilule contraceptive,
- 1970 pour que le père ne soit plus l'unique chef de famille,
- 1975 pour l'avortement, le divorce par consentement mutuel et la suppression du délit pénal d'adultère,
- 1981 pour abroger la surpénalisation de l'homosexualité,
- 1985 pour l'égalité des époux dans la gestion des biens de la famille et des enfants.

Malgré l'offensive laïque conduite par Émile Combes et Jules Ferry au détour du XXème siècle, l'immense majorité de la France était, en 1945, toujours d'obédience catholique. Deux petits tiers de la population se rendaient hebdomadairement à la messe, contre un vingt-cinquième désormais.
En 2013, les français se répartissent sensiblement à part égales entre croyants, non religieux et athées.

Les 26 journaux quotidiens nés à la Libération tiraient 1 exemplaire pour 9 français. Six chaines de radio complétaient ce paysage médiatique. La télévision a fait son apparition en 1949 et s'est généralisée dans les années 1960.
Aujourd'hui, internet et une profusion de chaines radio & TV ont supplanté la presse papier moribonde qui ne compte plus que 8 titres nationaux diffusant 5 fois moins qu'en 1945.

Cause ou conséquence de ces multiples évolutions, la consommation de vins et spiritueux s'est écroulée. Vers 1945, chaque adulte ingurgitait l'équivalent d'un litre d'alcool pur tous les 13 jours.
En 2013, le même français moyen met plus d'un mois à s'envoyer un litron d'éthanol derrière son absence de cravate.

Statistico-optimistiquement votre

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Les statistiques citées dans cet article proviennent essentiellement de l'INSEE, de l'INED, de Wikipedia et de Google.