samedi 23 janvier 2016

2 français sur 3 hors religion

​Le terrorisme et l'augmentation des migrants ont déchaîné en France un maelström de passions religieuses et anti-religieuses.
Désormais, bistrots, médias et politiques s'enflamment à propos d'islam, de laïcité, de catholicisme, d'identité et de judaïsme. Au point, je pense, de rendre jaloux bouddhistes et protestants.

Fidèle aux rites de ce blog, je vous propose d'examiner les croyances et incroyances hexagonales avec le regard distancié des statistiques.

Le pays de Voltaire, Pascal et Diderot

Les français, pris dans leur ensemble, ont un positionnement varié et équilibré vis à vis des religions.

Un tiers s'énonce non religieux, c'est à dire qu'il doute ou encore que la métaphysique ne l'intéresse pas.
Dans le même temps, un copieux tiers affirme être croyant et un petit tiers ne placer aucune foi en Dieu.

Proportions de français se déclarant religieux, non religieux ou athées

Le pays du petit père Combes

Toutefois, en rassemblant athées et non religieux, les fidèles apparaissent nettement minoritaires.
Les français qui dédaignent le Ciel sont presque deux fois plus nombreux que ceux qui s'y réfèrent.

Proportions de français se situant "hors religion" et de français religieux

Le pays de Charles de Gaulle, Abd al Malik et André Chamson

2 croyants sur 3 - soit 1 français sur 4 - sont catholiques.

L'islam, deuxième foi hexagonale, est clairement distancé avec environ 1 français sur 20, un peu plus d'un croyant sur 7.
Les tenants du catholicisme gallican sont 5 fois plus nombreux que les musulmans bleu-blanc-rouge.

Bien que la France soit la patrie de Jean Calvin, à peine 1 français sur 25 s'énonce protestant, un gros dixième des croyants.

Les autres confessions pèsent sensiblement autant que le protestantisme.
Parmi elles, le judaïsme - pourtant plus ancienne religion française avec plus de 2 000 ans de présence ininterrompue - n'atteint pas 1% de la population hexagonale, grosso modo 1 croyant sur 40.


Paysage religieux et spirituel français

Le pays de 2 traditions

L'histoire religieuse complexe, turbulente et ensanglantée de la France a créé deux fortes traditions structurantes.

D'une part, le catholicisme, autrefois religion d'état et longtemps dominateur, tient une solide seconde place sur le podium de la foi.

D'autre part, pour faire simple, les Lumières, la Révolution Française et les Républicains sont à l'origine d'un courant difficile à qualifier alliant athées, agnostiques, libre-penseurs et anti-cléricaux plus ou moins virulents.
Depuis les années 1960-1970, cette mouvance a décroché la médaille d'or et va, probablement, la conserver un très long moment.

Jointes l'une à l'autre, ces deux traditions françaises écrasent aujourd'hui la scène spirituelle avec l'adhésion de presque 9 français sur 10.

Les autres religions, même si certaines affichent de sympathiques taux de croissance, sont loin derrière.
Si musulmans sunnites et chiites, protestants de toutes dénominations, juifs, orthodoxes, bouddhistes, hindous et de nombreux autres que je n'ai pas la place de citer se réunissaient, ils n'atteindraient qu'un septième du collectif groupant libres-penseurs et catholiques.

Proportion de français d'une part "hors religion" ou catholiques et, d'autre part, adeptes d'une autre spiritualité.

Coexisto-diversement votre

Références et compléments
Cliquer sur les graphiques pour les agrandir.

Voir aussi sur des thèmes connexes les chroniques :
Brève présentation des personnalités citées :
  • Charles de Gaulle (1890 - 1970) n'a jamais dissimulé sa foi catholique. Toutefois, en bon laïque, il n'en a jamais fait de démonstration publique dans ses fonctions officielles
  • Emile Combes (1835 - 1921), surnommé le "petit père Combes", fut un homme politique emblématique du combat laïc et anticlérical aux alentours de 1900.
  • André Chamson (1900 - 1983) écrivain, conservateur de musée et résistant français.
    Protestant engagé, il prit plusieurs fois la parole lors de l'Assemblée annuelle du Désert dans les Cévennes.
    Un extrait d'un de ces discours fait partie des "10 citations contre le terrorisme et la barbarie".
  • Abd al Malik, alias Régis Fayette-Mikano, est un rappeur, compositeur, écrivain et réalisateur français né en 1975.
    Converti à la foi musulmane, initialement très proche des milieux tabligh, il revendique désormais, notamment dans son livre "Qu'Allah bénisse la France", une pratique soufie ainsi qu'un islam "des Lumières" compatible avec la laïcité française.
  • Les trois grands écrivains des XVIIème et XVIIIème siècles représentent la diversité spirituelle française.
    - Voltaire (1694 -1778) était un déiste non religieux à la pointe du combat pour le respect de toutes les croyances.
    Ce lien permet de télécharger le traité sur la tolérance de Voltaire, texte splendide, aisé à aborder et, hélas, toujours d'actualité.
    - Denis Diderot (1713 - 1784) s'affirmait athée.
    - Blaise Pascal (1623 - 1662) clamait son catholicisme tendance janséniste, nous dirions aujourd'hui rigoriste, voire intégriste.
  • Jean Calvinà ne pas confondre avec les jeans Calvin Klein - est né à Noyon en Picardie en 1509 et est mort à Genève en 1564.
    Ce théologien est, avec l'allemand Martin Luther, un des deux principaux instigateurs de la réforme protestante. Calvin transforma Genève en rigoriste république religieuse, un prototype du Téhéran des ayatollahs en quelque sorte.
    L'auteur s'enorgueillit toutefois d'avoir étudié au lycée pourtant public et laïc de Noyon, plaisamment baptisé, si j'ose dire, Calvin.
     
Les données proposées dans ce billet sont les mêmes, avec une autre présentation notamment graphique, que dans la chronique de janvier 2015 "Les musulmans en France combien de divisions ?".

Principales sources :
  • Deux sondages CSA & IFOP de 2013, intitulés chacun “le catholicisme en France”
  • Sondage WinGallup & REDC de 2012 “global index of religion and atheism” employé aussi dans la chronique "Les religions combien de divisions ? Statistiques de la foi"
  • Sondage IFOP de 2011 “les français et la croyance religieuse”
  • Sondage IFOP de 2009 “étude sur l'implantation et l'évolution de l'islam en France”
  • Sondage CSA de 2004 “les français et la religion”
Ces enquêtes ont des questions et des méthodes très disparates, difficiles à réconcilier. Aussi j'ai procédé avec la méthode dite "des manifestations" consistant à moyenner les chiffres des organisateurs et ceux de la police.

Ce nouveau billet statistique sur les religions et l'athéisme en France doit beaucoup à la twittonaute Bee / @ElisabethBelloc ainsi qu'aux échanges caféinés avec Jean. Un grand merci à tous les deux.